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Envoûté par les pluies d'hiver

Tu nages dans tes nuits d'éther

Difficile ascension au revers de tes rêves

Dans les matins hérissés de rayons héroïques

Se déploie l'hirsute armure de tes oublis

Tu déplieras ta journée, hypnotisé par la nuit

 

Interroge alors l'hymne secret déposé en toi

Écoute la résonance intérieure tracer ta quête

Telle la cigale au zénith de juillet

Arrimé à l'écorce de tes songes

Tu feras peau neuve, irradié

Dans le cœur d'un poème d'été

*

L’été s’écorce frivole

De longs feuillets chiffonnés

Crissent dans tes mains incertaines

Et tu écris encore car tu entends toujours

Le frémissement délicat, cette voix fébrile

Singulière présence intérieure, bouture fragile

Elle racine en toi

​*

Tu expérimentes des heures asséchées de lumière

Alors, derrière le rideau d’une langue boisée

Tu t’arrimes à l’ouvrage et reprends tes outils

 

Suspendu au souffle court d’une clarté étouffée

Décillé par l’image vivace d’une nature luxuriante

Tu cherches peut-être en vain d’élaguer ton esprit

 

Aussi, interroge en toi la floraison qui luit dehors

Redeviens, l’espace d’un poème, cette pensée absente

Rabote en toi l’écorce de tes années minérales

 

Tu attends du poème une régénération de ton arbre intérieur

Cette âme solide et fragile chargée de pluies et de vents lancinants

 

Ne t’oppose plus au silence nourricier de l’ombre

Elle devance ton inspiration, laisse-la advenir   

 Écoute la fine pluie d’ébène

Ressens la légère brise qui ondoie

 

Oui, ajourne l’excès de réflexion

Tes feuillets irrigués s’ensoleilleront

*

Une mémoire olfactive éclaire ton jardin intérieur
Comme une lanterne, ombellifère odorante
Elle dirige parfois tes excursions oniriques
 
Le fenouil a poussé seul au pied de ta chambre
Il embaumait ton réveil engourdi par l’oubli
 
Or, tes nuits se souviennent dans le cœur grenat des Lilas d’Espagne
Et tu survis en prenant tes quarts à l’ombre de leurs haies
 
Mère nature tu réparais les blessures de mon âme
Ecorché par la violence de l’indicible hébétude
 
Ne crains plus l’orage des passions diluviennes
Espère dans la douce réminiscence des parfums suaves
L’herbe verte fraîchement coupée et la pluie d’été électrique
 
Ressent le susurrement gracile des feuilles de tilleuls
Elles écrivent pour toi une ode à la sérénité
Entrouvrent leurs ailes de papiers calques
 
Tu peux à présent lire les confidences de l’astre solaire
Respire ici et maintenant ses promesses
 
Une chaleur exhale des senteurs de terre ocre
 
*

Dans les espaces du poème

Tu conquiers à nouveau un souffle

Respire la clameur silencieuse de son haleine

Puis, approche-toi de son baiser

Ce serait une inconnue caresse d’or

Fidèle interprète, tu essaies simplement

D’en retranscrire le pouls

Un poème s’ébat

*

S’érode en toi les reliefs du rêve alangui

Ton regard essoufflé dans ce désert de lumière

Tu ne patientes plus dans ses yeux ourdis par la nuit

Devant ces heures soustraites au scalpel de l’éclair

Une voie de mémoire irrigue soudain ta cécité

Tu t’éveilles assoiffé par le ressac de l’enfance

Exalté, dans l’entrelacs de ton errance

Le portillon vert entrouvert sur ta cour pavée

Te rappelle l’inaltérable joie d’une déprise fertile

Dans l’alternance du rêve à la lisière des feuillets de l’aube

L’écriture colore d’une nouvelle lueur pastel

Le souvenir du long exil dans ton passé

Inactuelle présence, dans l’indécise fuite du songe

Une nouvelle clarté inondera tes chemins de liberté

Porté par la brillance de l’aurore, renaissant, tu marcheras

Un matin d’été balbutiant, dans la vacance de l’esprit estival

Écoute le bourgeonnement silencieux de ton âme

Conquise par le concile des oiseaux

 

Tu apprivoises et tu épèles le nom de la grâce

Une nature ivre de vie t’embrasse, semonce du vent

 

Rémiges et ramures ébouriffées en un ciel cristallin

Écrivent un poème élémentaire à la source de l’éveil

 

Dans le houppier d’une langue en fleur

Tu deviendrais résident de l’irréelle beauté

 

Toi, l’homme de la forêt envahi par les nuits de la ville

Tu gravis avide l’écorce craquelée du sonore

 

Car tu sais combien les ors boisés de la poésie

S’accordent à l’éblouissante nature

Tes jours sont des siècles multipliés, travaillés, infinis
Des petits murets en pierres sèches centenaires à moitiés éboulés
Ils bordent tes sentiers dans le cœur de ta mémoire fanée

Dans la pénombre naissante, sous la dictée silencieuse de l’écriture
Tu écoutes le récit feutré de tes saisons révolues
Fleurissent des poèmes attisés par les secousses de la nuit

Tu avances jusqu’à l’aube et tes mots sont des aiguilles de pin
Ils chutent lentement à la surface de tes chemins
Des feuillets charbonneux insensiblement s’éclairent

Parvenu à la lisière du jour nouveau
Ta terre de bruyère noire s’illumine, encore ceinte du minéral ouvragé
Et tu te souviens insensiblement dans le corps de la langue

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